On l’a vu, on sait obtenir du gluten (dit alors ; poudre de gluten vital) par lavage de la farine. Le procédé une fois industrialisé est très gourmand en eau et polluant de manière organique 52. L’amidonnerie, productrice par voie de séparation d’une part d’amidon et d’autre part de gluten vital (et peut-être à l’avenir l’industrie productrice de bio-éthanol 53 ) est parvenue parfois a donner au céréaliculteur un incitant financier supérieur (2 X plus) que les meuniers, pour revendre ce même gluten aux mêmes meuniers .

Ce qui s’appelle un transfert de plus-value entre secteur économique 54 .
Les protéines du blé sont non grasses, contrairement aux protéines animales souvent accompagnées de graisses.
C’est à ce point qu’en industries alimentaires, on en ajoutent à certains aliments (chewing-gum, céréales du petit déjeuner, jus de fruits, etc…) pour en faire des produits plus complets dans leurs apports nutritifs et/ou pour leurs propriétés technologiques 55.

L’utilisation du gluten comme emballage alimentaire est également fort étudié 56 . Après l’approche extra-boulangère du commerce du gluten qui ne sera pas sans conséquence, revenons à la panification.

Des faits précités et du fait que l’apport en poudre de gluten vital est moins onéreux que l’apport de froment de force contenant beaucoup de gluten 57 , la production de gluten est passée de 20.000 tonnes à 270.000 tonnes de 1980 à 1990 58 , et les importations de gluten en France, sont passées de 596 tonnes (en 1973) à 18.503 tonnes en 1985 59.

Il faut certainement interprété la demande de « machinabilité » dans ces chiffres multiplié par 15 sur +/- 10 ans ! Peut-on dire que l’on rectifie le résultat d’une récolte.

Ne devrait-on pas voir dans ces chiffres une demande plutôt additive que corrective, pour atteindre des performances toujours plus grandes, surtout en pain de mie et en procédés de panification différé par le froid. Si l’ajout de gluten s’indique, plusieurs aspects doivent être pris en compte.

D’abord l’affinité de l’ajout de gluten vital avec le gluten natif, le conseil du professeur Calvel est de ne pas dépasser les 2% au kg. de farine 60

En France et en pratique, on dépasse rarement ces 2% 61 , mais dans les mixes, mélanges meuniers pour farines boulangères, et surtout dans les mélanges prêts à l’emploi comportant beaucoup de fibres, un ajout de 8% par part de farine complète est autorisé en Belgique 62 .

L’aspect qualitatif du gluten vital est encore plus important, d’autant que les procédés d’extraction et de séchage sont susceptibles de le dénaturer 63 .
Lors de l’analyse de 41 lots de gluten vital, une étude mis en évidence une telle diversité, qu’il y avait autant de qualité que de lots de gluten vital 64 .
C’est clair, il faut se montrer prudent quand à l’efficacité de la poudre de gluten vital.



52 Le procédé Martin utilisé le plus généralement, consomme 5 à 6 m_ d’eau par tonne de farine , le procédé Batter en utilise encore plus, voir Y. DACOSTA, p.65 & 66. Pour les effluents polluants il sont calculés en terme de Demande de Biodisponibilités d’Oxygène (DBO) de 20.000 mg./l. ),voir ; S. BEROT & B.GODON, p.75. Cette pollution semble importante, même si des levures dans des bassins de décantation font merveille. Il faut tenir compte également de la concentration d’amidonneries qui « réunit » les rejets organiques en 3 points en France et 1 en Belgique.

53 Yves DACOSTA, page d’introduction, précise « l’accélération éventuelle par la mise en service de grandes unités de bio-éthanol, pour lesquelles le gluten sera un co-produit important, dont l’écoulement sur le marché conditionne pour une part non négligeable la rentabilité des investissements engagés ».

54 Voir Vincent OLDENHOVE, p.145.

55 Yves DACOSTA, p. 109 à 114.

56 Le prix céréalier 1992 a été attribué à Nathalie GONTARD pour son étude « Film et emballages comestibles et/ou biodégradables à base de protéines issues du gluten de blé ». Ce sera un des points de départ de cette recherche.

57 On évite le transport de « charge » plus lourde et coûteuse s eous forme de froment améliorant ou de force venant parfois de loin (par ex. :Etats-Unis, Canada), aux prix fluctuants et ou il est nécessaire d’acheter des gros tonnages. Certaines publicités d’amidonneries déclaraient qu’il fallait 11 fois moins de gluten que de froment de force pour la même correction de farine faible, ce qui semblait optimiste d’après l’auteur publiant l’information, Y. DACOSTA, p.102 et 103.

58 G.DECOURCELLE, p. 46.

59 P.ROUSSEL & H.CHIRON, p.108

60 Pr. Raymond CALVEL, 1987.

61 Voir : Philippe ROUSSEL, p.604. qui signale la pratique courante et le fait que l’ajout n’est pas limité en France.

62 Voir ; le Journal Officiel belge, Le Moniteur Belge du 7 novembre 1985 publiant les arrêtés royaux du 2 septembre 1985 relatifs à la farine et aux pains et autres produits de boulangerie.

63 O.DARDE, p. 9.

64 O.DARDE, p.2 à 9 , étude réalisée à la demande Gers-Farine S.A. Elle démontra des différences de W de l’alvéographe Chopin de 71 à 222 pour les farines reconstituées.